Dieu du ciel… Voila un post qui s’annonce difficile a rediger, vu le nombre important de jours qui se sont ecoules depuis le dernier et les difficultes que j’eprouve toujours a exprimer ce que j’ai ressenti durant ma semaine sur l’ile de Paques. Heureusement, je n’ai pas effectue dix mille deplacements durant ce laps de temps, ce qui me donnera peut etre l’occasion de sortir de mon carcan « lundi, mardi, mercredi »…
Ma semaine sur l’Ile de Paques a ete incroyable. La location du scooter m’a permis de silloner l’ile en tous sens, de voir et revoir certains des sites qui m’ont le plus interpelle et de regouter au sentiment de liberte que me donne ce moyen de locomotion.
Avant de vous parler de l’ile en elle-meme, petit flashback sur les personnes qui ont partage mon quotidien durant cette semaine.
Lors de mon arrivee a l’aeroport, je me retrouve avec deux americains et deux japonaises dans le petit van qui nous conduit a l’auberge.
– Tyler est le premier avec qui j’engage la conversation. Texan, l’image typique du Yankee egocentre qui pense que le monde entier devrait parler anglais avec un accent nasillard. Les ambassades americaines etant territoire US, il est normal qu’il ne fasse pas la file et si par malheur un chilien devait lui faire une remarque, il s’empresserait d’en faire rapport au personnel present pour qu’on lui interdise l’acces au plus beau pays du monde. Autant vous dire que mes echanges avec Tyler furent tres limites.
– Aaron : hawaaien, detendu, nous avons passe pas mal de temps ensemble, jusqu’a mon depart de Santiago. Tout le contraire de Tyler. Mais bon, Hawaai, ce n’est pas vraiment les Etats-Unis, si ? Le jour du depart de Tyler, un bon vieux cafard squatte notre chambre l’espace de 24h. Aaron me fait tres justement remarquer que nous n’avons pas perdu au change.
– Marko : certains d’entre vous auront peut-etre entendu parler de Marko. Avec Aaron et Tyler, il est le quatrieme laron de notre dortoir. 25 ans, finlandais, revant de devenir boxeur professionnel, tatoue, il peut faire peur au premier abord et a vecu ses 15 minutes warholienne sur l’ile. Le lendemain de notre arrivee, il decouche et ne revient que le lendemain apres-midi, entoure de deux detectives de la police chilienne. Marko a en effet eu l’excellente idee de tenter de ramener un bout d’oreille de l’une des statues en guise de souvenirs. Autant vous dire que sur Rapa Nui, on ne plaisante pas avec les statues. Resultat : une nuit en prison, une amende qui avoisinera les 20.000 US dollars, et une eventuelle peine de prison pouvant monter jusqu’a 7 ans ! Durant toute la duree de mon sejour, il ne peut sortir de l’auberge, attendant une decision de la justice chilienne. Le geste est stupide, il en est parfaitement conscient et regrette son erreur. Meme si tout le monde est d’accord pour condamner son geste, une solidarite se developpe parmi les autres voyageurs, et nous nous alternons pour lui procurer nourriture et autres denrees. Marko se revele etre plus que sympathique et a l’heure ou je tape ces quelques lignes, il doit encore etre en train de se morfondre sur l’Ile… J’espere sincerement qu’il ne devra que payer son amende et qu’il ne croupira pas en prison pour quelques annees (ses tatouages, a l’inverse de Michael Scoffield, ne representent pas le plan de la prison de Santiago…)
– Raoul : espagnol, extraverti au possible, drole, cynique et adepte du second degre, il anime nos soirees et me fait decouvrir le Bruce Douglas, un whisky ecossais qui, je pense, ne doit etre en vente que sur l’Ile de Paques (et qui coute un peu plus qu’une bouteille d’eau de 1,5 litres)… Genial inventeur du Cat-Bowling, sport se pratiquant de preference avec un chaton et une dizaine de canettes de biere vides (je n’etais pas present !).
– Julio : italien comme on l’entend. Mixe l’espagnol, l’italien et l’expression corporelle de fort belle maniere, et souffre d’une obsession chronique vis a vis d’une conductrice de taxi rencontree a son arrivee.
– Bryan : autre texan, chauffeur de camion, je songe fortement rediger un post bjornesque a son sujet, tant le personnage m’a rappele Bjorn (sans les phases de comas et avec un vocabulaire plus developpe). Avec lui, Julio et Raul, nous formons un quatuor de joueurs de kicker acharnes durant les premiers jours, avant d’echanger le ballon contre un jeu de carte espagnol et chinois…
– Les deux japonaises : s’enfuiront apres quelques nuits, vu le nombre (excessif a leurs yeux) de cafards presents dans et autour de l’auberge. A moins de se refugier plusieurs metres au dessus du sol, je ne suis pas sur qu’elles aient trouve un autre endroit sur l’ile depourvu de ces charmantes bestioles…
– Anna et James : un couples ecossais, adeptes des Monthy Pythons, de ce bon vieil humour so British, de whisky et de vin. Chanteurs de chorales, je les retrouve a Santiago apres mon retour.
L’ensemble de ces personnes a rendu mon sejour sur l’ile encore plus plaisant. Il etait agreable de se retrouver autour d’un bon vieux jeu de cartes le soir, apres une journee passee sous le soleil et dans la poussiere a arpenter l’ile.
Quant a l’ile en elle-meme, j’en garde une impression merveilleuse. Le fait que personne ne puisse expliquer l’utilite des Moai’s ni leur signification permet a tout un chacun de laisser son imagination vagabonder, et de construire sa propre interpretation. Les statues ont un air grave, la bouche decrivant une moue les rendant severes. Le regard est oblique, dirige vers le ciel. Que fixent-elles ? Est-ce une maniere de nous signifier qu’elles ont atteint une connaissance qui leur permet de se detourner de monde terrestre, de s’elever au-dessus des preoccupations du commun des mortels ? L’ile compte quelques sites ou l’on peut observer les statues alignees. De 5 a 15 statues, etre a leurs pieds donne l’impression d’etre face a un tribunal compose de differents sages. Les visages sont souvent tous differents, mais quoiqu’il arrive, aucune ne vous regarde…
Mes deux sites preferes furent Rano Raraku et Puna Pau. Rano Raraku, c’est le berceau. Les flancs exterieurs de ce volcan sont couverts de statues plantees dans le sol. L’interieur quant a lui possede une lagune ou quelques chevaux paissent tranquilement. En escaladant les parois, on retrouve quelques statues, et l’on peut observer les differents endroits qu’utilisaient les tailleurs realisant les Moai’s. Certaines des statues sont encore prises dans la roche volcanique, les visages sculptes et le reste du corps en cours de finalisation. A 5 minutes du volcan, 15 statues alignees tournent le dos a la mer, faisant face au volcan. En marchant entre les statues non extraites de la roche, celles disseminees a l’interieur et a l’exterieur du cratere, j’ai l’impression qu’elles sont dotees d’une vie propre. Sortant de la roche, elles descendent la pente jusqu’a la lagune, et se dirige vers les points qui leurs sont assignes sur l’ile, mues par une force propre et sous le regard bienveillant des 15 sages…
Puna Pau n’est pas le site le plus courru de l’ile et est en fait la carriere ou etaient faconnes les « chapeaux » qui couvrent la tete de certains Moai’s. Le site est calme, petit, mais les 10 tonnes qu’atteignent certaines de ces « meules » me laissent perplexe. Comment ont-ils fait pour acheminer ces rocs jusqu’au sommet des statues, sachant que certains Moai’s sont a une dizaine de kilometres de la carriere ? Ils les faisaient probablement rouler, mais il fallait le vouloir, et surtout reussir a les hisser (parfois a plus de 7 metres au dessus du sol)…
Environ 800 statues peuplent l’ile (contre 3700 humains selon le dernier recensement) et beaucoup d’entre elles sont tombees de leur autel avec le temps. Un tsunami en 1960 en a endommage certaines, et l’acces a certaines zones de l’ile est encore reglemente car sujet a des fouilles et restaurations.
Apres une semaine dans ce cadre, le retour a Santiago est un peu comme une claque. Je considerais mon sejour sur l’ile de Paques comme des vacances au sein de vacances, et force est de constater que ce petit moment de nostalgie typique des retours de vacances me gagne des mon arrivee a Santiago. L’impression qu’une partie de mon voyage est derriere moi (ce qui, dans tout les cas, est vrai, mais c’est la premiere fois que je le realise).
J’accorde a Santiago une bonne journee et demie de visite en complement de mon apres-midi pre-paques. Megalopole, les grandes avenues sont bruyantes et fortement peuplees, mais il est possible en quelques minutes de se retrouver dans de petits quartiers calmes et typiques, sorte de poumons de tranquilite dans un corps pollue et hyperkinetique. Avec Aaron, nous retrouvons Cynthia, journaliste locale et rencontree a Rapa Nui. Elle nous emmene dans de petites ruelles du centre, et nous dinons ensemble dans un restaurant specialise en cuisine patagonienne. Truite et mousse au chocolat pour le meme prix qu’une pizza sur Rapa Nui, je suis aux anges.
Et apres Santiago, j’entame une timide remontee vers le Nord. Je prends mes quartiers a Vina del Mar, sorte de station balneaire a deux heures de Santiago, sise juste a cote de Valparaiso. Ce mercredi a ete quelque peu brumeux, mais j’espere pouvoir compter sur un bon soleil demain pour approfondir ma visite de Valpa, ville declaree patrimoine de l’humanite et ou d’antiques systemes d’ascenseurs permettent de monter sans efforts les collines sur lesquelles sont situes les principaux quartiers de cette agglomeration. J’y ai fait un rapide passage cet apres-midi, visitant au passage la maison de Pablo Neruda (sa maison a Santiago m’avait fortement plue, et le personnage vaut le peine de s’attarder dans ses lieux de vie), et Valpa est un endroit ou il fait bon deambuler dans sa kyrielle de petites rues bordees de maisons colorees.
Le prochain arret sera a Serena, avant San Pedro de Atacama. Si tout se passe bien, je devrais effectuer une traversee du desert de 3 jours qui me conduira en Bolivie d’ici le debut de la semaine prochaine…
Nos vemos !
2 commentaires
hello mon petit J! Merci pour ce post, ça fait du bien de te lire! Gros bisous, stef
« Comme face à un tribunal composé de sage » et malgré tout tu ne m’appelles pas pour assurer ta défense. Tu me vexes, J, là, tu me vexes!
En tout cas tu donnes l’impression que l’étoile de routard « ile de Paques » restera à une de tes plus belles….
Ca donne envie en tout cas.
PS: y-a-t-il des femmes Moias?
A+